Le feuilleton électoral sans fin né de la présidentielle étasunienne, tient le monde entier en haleine. Trump déclaré perdant ne l’entend pas de cette oreille et copie sur le coup les artifices tant décriées venues d’Afrique. «On n’organise pas par exemple une élection pour la perdre !»
Le refus du Président sortant de reconnaître sa défaite associée à sa volonté inaltérable de démontrer contre vents et marées sa « victoire volée » par les Démocrates, témoigne d’une ère où la démocratie occidentale est saisie par ses propres doutes et incertitudes. Donald Trump surfe à ses risques et périls sur une vague d’essoufflement démocratique à travers le monde, pour jouer son coup de poker au coeur de la machine démocratique mondiale.
Ses partisans ont envahi le Capitole comme il a souhaité, laissant quatre morts sur le carreau. Que cela plaise ou pas aux convictions chauvinistes, il s’est agi en réalité d’un coup de force dans l’antre de la démocratie mondiale. Comment le comprendre ? Qu’est-ce qui n’a pas marché ? A force de faire la politique de l’autruche les puissances occidentales, dans leur hypocrisie congénitale, sont en train de payer cash le prix de leurs multiples errements démocratique à travers le monde.
Déjà, l’arrivée de Donald Trump au pouvoir avait suscité une vive contestation aux Etats-Unis. Le camp démocrate accusait le remplaçant de Barack Obama d’être de mèche avec les Russes. L’opinion ressassait à cette époque que le pays de Vladimir Poutine avait massivement influencé les électeurs américains pour un vote en faveur du vainqueur. C’était déjà en soi une porte ouverte à la vulnérabilité de la démocratie américaine.
Tout le monde s’est tu, comme si les accusations de la candidate Hilary Clinton en son temps manquaient de pertinence ou de fondements. Soit ! Voici donc Trump qu’on accusait d’intelligence avec les Russes, en train de jouer dans le même registre. Il accuse le démocrate Joe Biden et les siens d’avoir volé ses voix. On en finit plus avec le vote aux Etats-Unis manipulé tantôt de l’extérieur, tantôt truqué de l’intérieur.
Si le doute sur ces allégations s’entretient encore dans les chaumières, voici la prise du Capitole, qui eût cru ?, qui vient remettre à l’ordre jour l’impérieuse nécessité de dépoussiérer la pratique électorale aux Etats-Unis. Toutes les Nations démocratiques du monde occidental manquent de mots assez durs pour qualifier cette dérive de Trump dans la violence, déterminé de défendre jusqu’au bout sa prétendue victoire volée.
La démocratie est-elle en train de d’imploser sur elle-même comme une étoile arrivée à la fin de ses jours ? Ou bien la pratique électorale aux Etats-Unis a-t-elle besoin d’un supplément d’âme pour imposer une dimension d’éthique dans les élections ?
A la vérité ce qui se passe au pays de l’Oncle Sam avait déjà montré à suffisance des signes précurseurs dans le monde. Partout, la montée des extrémismes connaît son apogée. En France, le Front National en moins de deux décades a présenté deux fois un candidat au deuxième tour de l’élection présidentielle. En Italie, en Espagne, partout en Europe l’extrême droite bouscule les convenances.
Il en va de même au Brésil où elle tient les rênes du pays. Mais quelle politique, quelle attitude a-t-on adoptée vis-à-vis de ces gens ? On les regarde tels des parias. On se souviendra qu’en 2002 par exemple, au deuxième tour, alors que Jean Marie le Pen était son challenger, Chirac refusa tout simplement de participer au débat à la veille de l’élection, comme pour montrer à l’opinion qu’il est un infréquentable quand bien même au sortir de l’élection il aura 17,79% des suffrages exprimés par les Français !
Faire feu de tout bois pour garder le pouvoir
En Afrique les chefs d’Etat, appuyés par leurs partenaires à travers le monde ne peinent à conserver leur fauteuil. Le Président Bush pour la circonstance est sortie de sa réserve pour parler de «République bananière ». En réalité, à côté du vote formel existe tout un mécanisme de fraude, de bourrage des urnes, d’achat des consciences et de violences électorales.
Le président sortant n’a pas de soucis liés à son bilan car il sait pertinemment bien qu’il ne doit pas nécessairement son siège présidentiel au peuple. Et puis, le président de la République a conscience qu’il a à lui les Forces de Défense et de sécurité pour imposer la paix au cas où son élection ou sa réélection soulèverait des mouvements populaires.
En Afrique francophone, il n’est pas aisé d’être opposant. Il peut même arriver que ce dernier remporte la présidentielle en dépit de tous ces travers sur le chemin. Toute une différence existe entre avoir gagné une élection et être à la présidence. Dans les pays africains francophones, la liste des présidents dits élus qui ne sont pas à la Présidence s’allonge.
Jean Ping est le premier sur la liste avec l’élection présidentielle très contestée avec Ali Bongo Ondimba de 2016. Le second est Maurice Kamto du Cameroun au sortir de l’élection vivement contestée de 2018. Le troisième est Martin Fayulu de la Rdc en 2019. Le dernier à entrer timidement dans cette caste restreinte l’année dernière est Cellou Dalein Diallo de la Guinée Conakry.
Intentions
Donald Trump aurait-il si bien assimilé le jeu qu’il était en train de le dupliquer aux Etats-Unis ? Dans ce cas, il est bien compris qu’il avait de ce fait des intentions de faire Joe Biden un« président élu» hors de la Maison blanche tout comme à son élection, Hilary Clinton avait clamé haut et fort avoir été élue par la majorité des électeurs et que c’était au niveau du vote des grand électeurs qu’elle avait perdu la partie.
A défaut de faire de faire de Joe Biden un « président élu », Trump a pris les habits des putschistes pour tenter de mettre un terme au décompte qui au Capitole confirmait sa défaite. Elle est confirmée et finalement acceptée par le mauvais perdant qui doit qui effectivement quitter la Maison blanche le 20 janvier prochain.
L’unique chose qui a sauvé les Etats-Unis de la tentative de l’actuel locataire de la Maison blanche est la solidité des institutions américaines. Elles font allégeance aux prescriptions constitutionnelles et non à un homme. La constitution américaine est au-dessus de Donald Trump, ce qui est l’inverse en Afrique où la loi fondamentale est un texte dont se sert à volonté le chef de l’Etat, le modifiant au gré des circonstances, selon ses visées.
Chez nous, Biden ne serait pas le prochain Président avec le soutien des puissances étrangères qui de toute évidence pensent encore que « la démocratie est un luxe pour les Africains», comme aimait à le répéter Jacques Chirac.
Le Messager