Les menaces qui pèsent sur les journalistes africains ne sont pas nouvelles, mais l’Union africaine lance un site web pour suivre et contrôler les menaces qui pèsent sur eux, afin d’améliorer la protection des travailleurs des médias et de soutenir le droit à la liberté d’expression.
Six journalistes africains ont été tués en 2020, selon la Fédération internationale des journalistes. D’innombrables autres ont été menacés, arrêtés, harcelés et censurés, selon plusieurs groupes de défense de la liberté des médias et des droits de l’homme.
L’Union africaine affirme aujourd’hui que cela doit cesser. Et pour ce faire, elle utilise l’outil le plus puissant des journalistes : les faits.
Un nouveau site web de l’UA, www.safetyofjournalistsinafrica.africa, a été lancé vendredi et permettra de suivre les menaces qui pèsent sur les journalistes africains.
« Nous sommes sur les épaules de ces géants, ces héros des médias en Afrique au nom desquels nous avons lancé aujourd’hui cette plateforme destinée à contribuer à mettre fin au harcèlement, à la détention, voire au meurtre de journalistes, simplement pour avoir fait leur travail », a déclaré siad Jovial Rantao, président du Forum des éditeurs africains, en évoquant la mémoire de ses collègues disparus. « Dans certains de nos bien-aimés continents, la liberté des médias, la liberté d’expression, l’accès à l’information, est une question de vie ou de mort ».
Rantao et ses collègues admettent volontiers que les journalistes sont souvent les personnages irritants qui se tapissent dans les couloirs du pouvoir pour crier des questions difficiles à des personnes importantes.
Ce sont aussi des personnages comme la journaliste d’investigation zimbabwéenne Hopewell Chin’ono, qui a récemment été libérée sous caution après trois semaines de prison. Il a été accusé de « communication de mensonges », après avoir tweeté que la police avait battu à mort un nourrisson alors qu’elle appliquait les règles de confinement de COVID-19.
Comme l’affirme le président sud-africain Cyril Ramaphosa, il n’est pas nécessaire d’aimer les journalistes ou leur travail pour soutenir cette initiative.
« Il faut défendre rigoureusement le droit des journalistes à faire leur travail, à écrire, à publier et aussi à diffuser ce qu’ils aiment, même si nous ne sommes pas d’accord avec tout ou partie », a déclaré M. Ramaphosa. « L’Afrique est en marche pour enraciner une culture des droits de l’homme, de la démocratie, de l’égalité des sexes, de l’inclusion, de la paix, de la prospérité, de la sécurité pour tous nos citoyens, et de la liberté et de l’indépendance sans entrave des médias. La plate-forme numérique pour la sécurité des journalistes en Afrique est un outil important pour promouvoir la sécurité des journalistes et des autres travailleurs des médias à travers l’Afrique ».
Mais, les défenseurs de la liberté des médias n’ont pas tardé à le souligner, cela ne signifie pas que les journalistes sont sans responsabilités. Lors du lancement virtuel du site web, les défenseurs de la liberté des médias ont parlé de Félicien Kabuga, fondateur de la tristement célèbre Radio Télévision Libre des Mille Collines au Rwanda. Il s’agit de l’organisme dont les journalistes ont activement encouragé les Rwandais à participer au génocide de 1994 qui a fait plus de 800 000 morts.
L’utilisation de cette plateforme par Kabuga pour répandre la haine et inciter à la violence l’a conduit en prison, à La Haye.
Le chef du Secrétariat de l’architecture de la gouvernance africaine de l’UA, Salah Hammad, déclare que l’UA établit une ligne directe entre un journalisme honnête et des sociétés robustes et pacifiques.
« Ainsi, lorsque nous parlons des droits des personnes, des droits de l’homme et des droits des peuples en Afrique, nous ne pouvons pas vraiment exclure la liberté des médias ainsi qu’un droit à l’expression et un droit à la liberté d’expression ainsi qu’un droit à l’information », a-t-il déclaré. « Et l’Union africaine, dans son acte constitutif, a clairement indiqué que l’Union africaine, dans sa totalité, est bien sûr très favorable à la promotion et à la protection de ces droits ».
La plate-forme permettra de maintenir l’attention sur les violations continues, comme la mort par balle, le 19 janvier, d’un diffuseur éthiopien dans la région du Tigré, déchirée par le conflit. Le Conseil éthiopien indépendant des droits de l’homme affirme que le journaliste, Dawit Kebede Araya, et un ami ont été tués par les forces de sécurité dans un style d’exécution.