Selon un rapport de l’organisation caritative MSF, près de 70 % des établissements de santé de la région du Tigré, dans le nord de l’Éthiopie, touchée par le conflit, ont été vandalisés et leurs équipements pillés.
Les installations ont été « délibérément » attaquées pour les rendre « non fonctionnelles », selon Médecins Sans Frontières.
La situation a un impact « dévastateur » sur la population, a déclaré l’organisation dans un communiqué.
Les autorités éthiopiennes affirment que la plupart des services de santé ont été rétablis.
Le conflit a éclaté au Tigré le 4 novembre 2020, lorsque le Premier ministre Abiy Ahmed a ordonné une offensive pour évincer l’ancien parti au pouvoir dans la région, le Front populaire de libération du Tigré (TPLF), après que ses combattants eurent capturé des bases militaires fédérales dans la région.
Les combats se poursuivent malgré la déclaration de victoire de M. Abiy à la fin du mois de novembre.
Des centaines de civils ont été tués et des dizaines de milliers déplacés au cours des cinq derniers mois, une situation qui a suscité des condamnations dans le monde entier.
Le mois dernier, Amnesty International a accusé les troupes de l’Érythrée voisine d’avoir tué des centaines de personnes dans la ville antique d’Axoum les 28 et 29 novembre, estimant que ces massacres pouvaient constituer un crime contre l’humanité.
Le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies a également lancé un appel urgent pour obtenir plus de 100 millions de dollars US (70 millions de livres sterling) afin d’atténuer les graves pénuries dans le Tigré.
Il a déclaré que trois millions de personnes, soit environ la moitié de la population du Tigré, ont besoin d’une aide alimentaire.
Quel est l’état des centres de santé dans le Tigré ?
Seuls 13% des 106 établissements visités par les équipes de MSF entre décembre et début mars fonctionnaient normalement.
Elles ont également trouvé des équipements détruits, des portes et des fenêtres fracassées, et des médicaments et des dossiers de patients éparpillés sur les sols dans les centres de santé de Debre Abay et May Kuhli, dans le nord-ouest du Tigré.
Lors d’une visite dans un hôpital de la ville centrale d’Adwa, ils ont constaté que des équipements médicaux, notamment des appareils à ultrasons et des moniteurs, avaient été délibérément brisés.
Un hôpital de la ville de Semema a été incendié tandis qu’une salle d’accouchement à Sebeya a été détruite après que l’établissement ait été touché par une roquette, rapporte MSF.
Les pillages d’établissements de santé se poursuivent, selon l’organisation.
Les autorités éthiopiennes n’ont pas répondu directement aux allégations de MSF, mais son ministère de la Paix a déclaré au cours du week-end qu’au moins 75 % des hôpitaux du Tigré étaient désormais opérationnels et que 10 % l’étaient partiellement.
Qui est à blâmer ?
MSF n’a pas nommé directement les responsables mais a appelé les « groupes armés dans le conflit » à respecter et à protéger les établissements de santé et le personnel médical.
Elle a accusé les soldats éthiopiens et érythréens d’occuper certains hôpitaux. Les deux gouvernements ont nié que des troupes érythréennes se soient rendues dans le Tigré, malgré des rapports persistants.
» L’armée a utilisé l’hôpital Abiy Addi [dans le centre du Tigré] comme base militaire et pour stabiliser ses soldats blessés « , explique Kate Nolan, coordinatrice d’urgence de MSF.
« Pendant cette période, il n’était pas accessible à la population générale. Ils devaient se rendre au centre de santé de la ville, qui n’était pas équipé pour fournir des soins médicaux secondaires – ils ne peuvent pas faire de transfusions sanguines, par exemple, ou traiter les blessures par balle », ajoute-t-elle.
MSF a également accusé les soldats érythréens d’utiliser comme base un centre de santé à Mugulat, dans l’est du Tigré.
Elle a également accusé les groupes armés de s’emparer d’ambulances.
Quel a été l’impact ?
Le Tigré possédait l’un des meilleurs systèmes de santé d’Éthiopie, avec un réseau de postes de santé dans les villages, de centres de santé et d’hôpitaux dans les villes, mais le conflit a « presque complètement effondré » le système, selon MSF.
Au cours des quatre derniers mois, les enfants n’ont pas été vaccinés, ce qui les rendra vulnérables aux maladies infectieuses à l’avenir, selon l’organisation caritative.
Les femmes enceintes, les patients atteints de maladies chroniques telles que le diabète, l’hypertension et le VIH, ainsi que les patients psychiatriques, n’ont pas accès à des médicaments vitaux, ajoute l’organisation.
« Les structures de santé doivent être réhabilitées et recevoir davantage de fournitures et d’ambulances, et le personnel doit recevoir des salaires et avoir la possibilité de travailler dans un environnement sûr », a déclaré Oliver Behn, directeur général de MSF.