Les professionnels des médias en Libye sont témoins d’une augmentation de la censure. Dix ans après le renversement du dirigeant historique, Moammar Kadhafi, les journalistes disent être toujours confrontés à des menaces de mort et à des intimidations.
Une journaliste de radio, Nahla Tarhouni, a déclaré à l’AFP que »l’état de la presse reflète l’état du pays ». »C’est catastrophique », a-t-elle ajouté. Mais Sanaa Habib, animatrice d’une radio privée, reste optimiste.
« La situation est plutôt bonne, elle n’est pas excellente ni géniale, mais bonne quand on la compare avec avant. Il y a dix ans, les médias en Libye n’existaient pas, car ils étaient biaisés à 100%, et seules certaines personnes publiaient les informations », a déclaré Habib.
Naima Mohamed est une journaliste libyenne qui travaille pour une station de radio privée. Elle est très préoccupée par les acquis qui ont déraillé depuis dix ans.
« Il n’y a pas de place pour la tromperie et il n’y a pas de journalistes qui n’ont pas souffert d’un revers. Pour quelqu’un qui s’est battu pendant 10 ans pour faire entendre sa voix, qui a réussi à s’exprimer librement, être soudainement confronté à la censure ne peut qu’être synonyme de déception », a déclaré Mohamed.
Les combats ont finalement cessé l’été dernier et le cessez-le-feu a permis à un nouveau gouvernement d’unité de prendre ses fonctions à la mi-mars. Il doit conduire la nation nord-africaine à des élections en décembre.
Les professionnels des médias ont payé un lourd tribut avant que cela ne se produise.
« Malheureusement, la Libye assiste à une augmentation du niveau de répression des libertés individuelles. Il ne s’agit pas seulement d’une répression de la liberté d’expression, mais il existe de réelles menaces dans la société contre la liberté d’expression, la formation d’associations et la liberté publique. Il y a une oppression exercée par les puissants de la société », a déclaré Mohamed al-Najem, directeur du Centre libyen pour la liberté de la presse.
Le Centre dénonce un « manque de volonté politique » des autorités libyennes pour défendre leurs droits et libertés.
Une vingtaine de journalistes ont été tués en « totale impunité » au cours de la dernière décennie, selon l’organisation de surveillance des médias Reporters sans frontières (RSF).
Le groupe classe la Libye au 164e rang sur 180 pays dans son classement 2020 de la liberté de la presse.
Des dizaines de journalistes, issus de médias libyens et étrangers, ont été attaqués ou enlevés par des milices, sans aucun recours à la justice.
Parmi eux, les journalistes tunisiens Sofiene Chourabi et Nadhir Ktari, qui ont disparu dans la région d’Ajdabiya, dans l’est de la Libye, en 2014.
Leur sort n’a jamais été officiellement confirmé, mais plusieurs sources ont affirmé que les deux hommes avaient été tués par des partisans du groupe djihadiste État islamique, qui a un temps exercé son emprise sur une partie du pays.