Jusqu’où va durer la crise entre Alger et Rabat ?
La question intervient alors que l’Algérie a décidé la fermeture « immédiate » de son espace aérien à tous les aéronefs civils et militaires marocains et aux aéronefs immatriculés au Maroc. La décision est entrée en vigueur mercredi 22 septembre, selon un communiqué de la présidence algérienne.
Cette décision a été prise lors d’une réunion du Haut Conseil de sécurité (HCS), présidée par le chef de l’Etat Abdelmadjid Tebboune, également ministre de la Défense. et se consacre à l’examen des « évolutions aux frontières avec le Royaume du Maroc » –
Elle intervient également un mois après l’annonce le 24 août par l’Algérie de la rupture de ses relations diplomatiques avec le Maroc, après des mois de tensions accrues entre les deux pays rivaux du Maghreb.
Les frontières aériennes de l’Algérie, fermées depuis le 17 mars 2020 en raison de l’épidémie de Covid-19, n’ont été rouvertes que partiellement le 1er juin à sept pays, dont le Maroc ne faisait pas partie.
Selon une source proche de la compagnie aérienne nationale Air Algérie, il n’y a eu aucun vol commercial direct entre l’Algérie et le Maroc depuis cette date. « Les vols entre les deux pays n’ont pas repris et les Algériens se rendant au Maroc transitent par Tunis ».
La décision d’Alger affectera principalement les avions marocains dont les routes survoleront le territoire algérien dans l’immédiat. Une source de Royal Air Maroc a déclaré que la fermeture n’affecterait que 15 vols hebdomadaires reliant le Maroc à la Tunisie, la Turquie et l’Égypte.
« Pratiques hostiles »
Après l’annonce de la rupture des relations, le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a reproché à Rabat de « n’avoir jamais cessé de mener des actions hostiles contre l’Algérie ». Les services de sécurité et de propagande marocains mènent une guerre ignoble contre l’Algérie, son peuple et ses dirigeants », a-t-il accusé, sans plus de précisions.
Bien qu’elles n’aient pas toujours été les meilleures, les relations entre l’Algérie et son voisin occidental se sont détériorées, notamment à cause de l’épineuse question du Sahara occidental, vaste territoire désertique dont près de 80 % est sous contrôle marocain.
Vient ensuite la normalisation des relations diplomatiques entre le Maroc et Israël – en échange de la reconnaissance américaine de la « souveraineté » marocaine sur le Sahara occidental – qui a encore exacerbé les tensions avec l’Algérie, partisane de la cause palestinienne, qui a dénoncé des « manœuvres étrangères » visant à le déstabiliser.
Alger a également accusé le Maroc et Israël de soutenir le MAK (Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie), une organisation indépendantiste, ainsi que l’organisation islamo-conservatrice Rachad, deux mouvements classés « organisations terroristes » par l’Algérie.
Bras de fer
La question du Sahara occidental, une ancienne colonie espagnole considérée comme un « territoire non autonome » par les Nations Unies en l’absence d’un règlement définitif, oppose le Maroc au Front Polisario soutenu par l’Algérie depuis des décennies.
Rabat propose un plan d’autonomie sous sa souveraineté, tandis que le Polisario appelle à un référendum d’autodétermination parrainé par l’ONU.
La rupture des relations était une décision que l’Algérie a dû prendre afin d’envoyer le « message approprié » au Maroc après « des actes hostiles à la souveraineté et à l’unité de l’Algérie », a déclaré mardi le ministre Lamamra sur CNN International.
Cette décision était « une manière civilisée de mettre fin à une situation qui ne pouvait plus durer sans causer de dommages et qui risquait d’entraîner les deux pays vers une voie indésirable », a-t-il déclaré. C’était une « situation anormale qui devait cesser de toute façon ».
Dans un geste d’apaisement, le roi du Maroc Mohammed VI a adressé samedi un message de « condoléances et de compassion » au président Tebboune suite au décès de l’ancien chef de l’Etat algérien Abdelaziz Bouteflika, ainsi qu’à la famille du défunt.
Le Maroc a soutenu que l’Algérie était injustifiée de couper les ponts et a qualifié ses arguments de « fallacieux et même absurdes ».
Ce n’est pas la première fois que les deux pays rompent les relations diplomatiques. La première fois, c’était le 7 mars 1976, à l’initiative de Rabat, après qu’Alger ait reconnu la République arabe sahraouie démocratique (RASD), autoproclamée par le Front Polisario.