L’ancien politicien kenyan Raila Odinga a annoncé vendredi qu’il présenterait sa cinquième candidature à la présidence lors des élections de l’année prochaine, mettant fin à des mois de suspense après une trêve surprise avec son ancien ennemi, le président Uhuru Kenyatta.
L’annonce dans un stade de Nairobi rempli de gros bonnets politiques et de milliers de supporters faisait suite à des spéculations selon lesquelles le joueur de 76 ans – qui était le visage de l’opposition du Kenya pendant des décennies – avait conclu un accord de partage du pouvoir avec Kenyatta pour obtenir son soutien pour le meilleur travail.
« J’accepte par la présente de me présenter comme candidat à l’élection présidentielle du 9 août 2022 », a-t-il déclaré sous de vives acclamations, ajoutant qu’il s’était engagé à construire un « Kenya démocratique et progressiste de notre vivant ».
Pilier de la politique kenyane, l’ancien Premier ministre – affectueusement surnommé « Baba » (« papa » en kiswahili) – reste extrêmement populaire malgré quatre défaites à la présidence en 1997, 2007, 2013 et 2017.
Mais son image anti-establishment enflammée a pris un coup en mars 2018 lorsqu’il a assommé le pays en serrant la main de Kenyatta quelques mois seulement après des affrontements post-électoraux meurtriers.
La trêve, connue universellement sous le nom de « la poignée de main », a suscité des spéculations selon lesquelles les deux hommes avaient conclu un pacte qui verrait Odinga succéder à Kenyatta, un président à deux mandats qui ne peut pas se représenter une troisième fois.
Les deux dirigeants ont également cherché à élargir l’exécutif par le biais de propositions de modifications constitutionnelles qui auraient potentiellement permis à Kenyatta de rester au pouvoir en tant que Premier ministre.
Mais malgré la décision de la plus haute cour du Kenya contre les amendements proposés en août, l’alliance inattendue a persisté avec Odinga assistant à des fonctions gouvernementales officielles avec Kenyatta.
« Un équilibre difficile »
Les observateurs disent qu’Odinga fait maintenant face à une menace pour la marque qu’il a passé des décennies à cultiver, à lutter pour la démocratie et à passer huit ans derrière les barreaux sous le régime autocratique de Daniel arap Moi.
« Il a du faire pour convaincre un groupe qui l’a toujours considéré comme l’opposant, et ceux qui le soutiennent, qu’il a toujours leurs intérêts en premier », a déclaré à l’AFP la politologue Nerima Wako-Ojiwa.
« Ce sera un équilibre difficile, et l’un des deux va forcément recevoir le bout court du bâton. »
Il devra faire face à un combat acharné contre son nouveau et beaucoup plus jeune rival, le vice-président kenyan William Ruto, qui s’était auparavant vu promettre le soutien de Kenyatta pour le poste le plus élevé en échange de son soutien.
Ruto, 54 ans, s’est positionné comme un leader cherchant à renverser le statu quo et à défendre les « arnaqueurs » qui tentent de joindre les deux bouts dans un pays dirigé par des « dynasties ».
Les familles Kenyatta et Odinga ont dominé la politique kenyane depuis l’indépendance en 1963.
Dans une interview à l’AFP en septembre, Odinga s’est dit confiant dans sa capacité à séduire les électeurs.
« J’ai des antécédents que les Kenyans comprennent très bien », a-t-il déclaré.
« Ils savent que si j’en ai l’opportunité en tant que chef du gouvernement, je peux introduire beaucoup de changements. »