Le charisme de l’homme d’Etat, la légitimité de son parti le Rassemblement démocratique du peuple camerounais, une armée fidèle. Voici autant d’éléments qui le maintiennent à la magistrature suprême.
A l’occasion de la brève visite officielle de François Hollande au Cameroun après son séjour en Angola et au Bénin. Paul Biya en pleine conférence de presse a été interrogé par un journaliste de France 2 sur sa longévité au pouvoir. « Vous êtes au pouvoir depuis 1982. Ce qui fait que vous êtes l’un des plus vieux présidents de la planète. Vous avez été élu plusieurs fois, vous avez fait plusieurs septennats. Effectivement, la constitution camerounaise ne limite pas le nombre de mandat.
Il y aura une prochaine élection dans trois ans. Je voudrais savoir déjà dans quel état d’esprit vous êtes, est-ce que vous imaginez qu’un nouveau mandat serait le bienvenu ou est-ce que vous comptez plutôt passer la main et considérer qu’une retraite serait plutôt bien méritée ? Dans quel état d’esprit vous êtes aujourd’hui ? », questionne le journaliste français.
Sa réponse va déchirer le silence de la salle et faire sourire bon nombre de journalistes camerounais. « Je commencerai par dire que ne dure pas au pouvoir qui veut, mais dure qui peut », lance Paul Biya tout en souriant sous le regard médusé de François Hollande, ex-président français. Cette longévité se justifie par plusieurs points.
Indivisibilité du RDPC
Paul Biya a réussi à établir le RDPC sur tout le territoire, à s’assurer la loyauté de l’armée et face à lui, l’opposition est divisée. Son parti, le RDPC, a réussi à mailler étroitement la quasi-totalité du territoire, à s’implanter là où les gens – et donc les électeurs – vivent. Pour Delmas Tsafack, chercheur et ancien analyste politique de l’ambassade de Belgique au Cameroun, il y a trois grandes raisons à cela : tout d’abord le « système électoral verrouillé »: « Ce système électoral ne permet pas d’assurer la transparence au moment des élections, malgré la mise sur pied d’un organe indépendant qui n’en est pas un. Les élections sont entachées de fraudes difficiles à démontrer juridiquement lors des procès électoraux.
Un président silencieux
Bien que souvent absent du Cameroun, et globalement très silencieux dans les médias, le président Biya a réussi à se maintenir au pouvoir sans que l’opposition ne parvienne à s’allier face à lui, sans essuyer de véritable soulèvement populaire pour réclamer l’alternance – hormis la contestation des mouvements séparatistes des régions anglophones.
C’est aussi dû à son armée. Hormis une tentative de coup d’Etat en avril 1984, Paul Biya a réussi à s’attacher les soldats de l’armée nationale, jusqu’aux officiers, en leur proposant un plan de carrière hors pairs dans la sous-région et en garantissant dans leurs rangs le renouvellement des générations.