L’ex-chef de la diplomatie Amon Tanoh craint que la réélection d’Alassane Ouattara au terme du scrutin du 31 octobre ne débouche sur des violences qui pourraient déstabiliser le pays.
Les jours passent et la pression monte en Côte d’Ivoire. A quelques semaines de la tenue de l’élection présidentielle, l’opposition ne désarme pas. Elle conteste la candidature d’Alassane Ouattara à un troisième mandat. Les Chefs de l’opposition en l’occurrence le Front populaire ivoirien de Laurent Gbagbo ou encore le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) de Henri Konan Bédié appellent à « une désobéissance civile ». Toute chose qui laisse penser à une crise post-électorale comme en 2010-2011.
Spectre d’un conflit post-électoral
Dans un entretien accordé à l’AFP, l’ancien ministre des Affaires étrangères Amon Tanoh, a livré ses impressions concernant l’élection du 31 octobre. Amon Tanoh, craint un conflit post-électoral. « Cette année, une quinzaine de personnes sont mortes en août dans des violences survenues après l’annonce de la candidature controversée du président Ouattara à un troisième mandat, violences qui avaient aussi souvent un caractère communautaire ».
L’ex-chef de la diplomatie poursuit «Il ne faut pas tout pour contraindre M. Ouattara à s’asseoir autour d’une table pour discuter, dialoguer, négocier. C’est la seule façon de résoudre cette crise post-électorale qui se dessine à l’horizon », a précisé M. Amon Tanoh, qui a longtemps été le directeur de cabinet de M. Ouattara. Devenu ensuite ministre des Affaires étrangères, il a quitté le gouvernement en mars ».
Report du scrutin
Comme toute l’opposition, il demande une réforme de la Commission électorale indépendante (CEI) et du Conseil constitutionnel, ainsi qu’un audit des listes électorales. « Si la CEI et le Conseil constitutionnel n’ont pas rendu compte de la véracité des parrainages, ils ne rendront pas compte de la véracité des urnes. Cette élection ne sera pas crédible », craint-il.
L’ancien ministre des Affaires étrangères, dont la candidature été rejetée pour une insuffisance de parrainages qu’il conteste, assure avoir agi sur le plan diplomatique et demande que la communauté internationale « exerce des pressions » sur le président Ouattara.
« Si on se rend compte qu’on ne peut pas régler les problèmes pour que cette élection soit crédible, apaisée et inclusive, il faut repousser la date. Compte tenu des risques que cette élection fait courir aux Ivoiriens, si on peut pas résoudre les problèmes, il faut reporter », a-t-il jugé.
Et de poursuivre « Je ne sais pas pourquoi il (Ouattara) pense qu’en dehors de lui et d’Amadou Gon Coulibaly-paix-à âme-personne d’autre ne peut diriger la Côte d’Ivoire », ironise Marcel Amon Tanoh. « La tentation (du troisième mandat), je l’ai sentie naitre quand il a fait sauter le plafond de l’âge ». La constitution de 2016 ne limite pas l’âge, à l’inverse de la précédente (75 ans).
Celui qui a travaillé dans les années 1990 avec M Ouattara qui était alors Premier ministre, est revenu sur son engagement : « j’ai cru déceler chez lui des valeurs. Il avait l’air d’être démocrate, attaché aux libertés, préoccupé par l’avenir de notre pays, d’avoir une vision, d’être soucieux de la justice… Petit à petit, je me suis aperçu qu’on s’écartait de ces valeurs (…). Pendant peut-être trop longtemps, j’ai accordé le bénéfice du doute », a-t-il détaillé. « Les dérives ont connu une très grande accélération ces derniers mois ».