Pour la première fois dans l’histoire de la Libye, cinq femmes occuperont des ministères importants au sein du nouveau gouvernement du pays.
Si cette initiative a été saluée, elle est loin d’avoir atteint la parité au sein du gouvernement de transition parrainé par les Nations unies et dirigé par Abdelhamid al-Dabaiba.
La Libye a sombré dans le conflit après que le dictateur Moamer Kadhafi a été renversé et tué lors d’un soulèvement soutenu par l’OTAN en 2011, avec un ensemble de forces luttant pour combler le vide.
Le gouvernement transitoire d’unité nationale (GNU), qui a pris ses fonctions cette semaine, doit relever le défi de sortir le pays d’une décennie de chaos et de divisions, en le conduisant à des élections nationales en décembre.
Mais avec cinq femmes parmi ses 26 ministres et six ministres d’État, il marque également un progrès relatif pour les femmes en politique.
Il s’agit d’une « étape majeure pour faire progresser les droits des femmes », a déclaré ONU Femmes en Libye, tandis que l’ambassadeur des États-Unis en Libye, Richard Norland, a déclaré qu’il s’agissait d’un « moment historique pour les femmes libyennes ».
Le cabinet est composé de 26 ministres et de six ministres d’État, les femmes étant affectées à cinq postes, dont les portefeuilles clés des affaires étrangères et de la justice.
Qui sont les ministres ?
Najla al-Mangoush : une militante de Benghazi, a été nommée à la tête des affaires étrangères. Cette avocate de formation s’est fait connaître en 2011 après avoir fait partie du Conseil national de transition (CNT), l’organe officiel de la révolution de 2011 qui a chassé le colonel Mouammar Kadhafi du pouvoir.
Mabrouka Touki Othman Aoki : Un universitaire du Fezzan, diplômé en physique nucléaire, dirigera le ministère de la Justice.
Halima Ibrahim Abderrahmane : L’avocate originaire de Gharyan dirigera le ministère de la Justice.
Wafaa Abou Bakr Muhammad Al-Kilani : Dirigera le ministère des Affaires sociales.
Houria Khalifa Miloud al-Turman : Dirigera le ministère de la Condition féminine.
Un grand pas, mais un long chemin à parcourir
Sur les médias sociaux, certains Libyens ont salué ces annonces comme « un grand pas », un « bond en avant pour la société » et un « début prometteur ».
Mais les militants sont moins enthousiastes, estimant que le nouvel exécutif avait la possibilité de faire plus.
Dans une déclaration faite cette semaine devant le Conseil des droits de l’homme des Nations unies, la Grande-Bretagne a exhorté le GNU à « œuvrer en faveur d’une participation pleine, égale et significative des femmes, y compris dans la résolution des conflits et la prise de décision ».
« Les femmes restent sous-représentées dans toutes les institutions et processus de gouvernance en Libye », a-t-elle averti.
Le Premier ministre intérimaire Abdul Hamid Dbeibah, qui a prêté serment lundi, a été sélectionné le mois dernier aux côtés d’un conseil de présidence de trois membres dans le cadre d’un processus parrainé par les Nations unies et lancé en novembre.
Les militants rappellent qu’il s’est engagé, lorsqu’il était candidat dans le cadre du processus de l’ONU, à attribuer 30 % des postes ministériels à des femmes.
Dans la composition actuelle, les femmes ne représentent que la moitié de ce pourcentage.
« Nous sommes fières de voir des Libyennes nommées à des postes clés, mais aussi mécontentes que le Premier ministre n’ait pas tenu son engagement », a déclaré Ghalia Sassi, présidente de l’association de femmes Maaha (avec elle).
Elle a promis que les militantes maintiendraient la pression sur le gouvernement pour qu’il rectifie le tir, mais elle a ajouté qu’il y avait « un long chemin à parcourir ».
Réduire au silence les femmes activistes
Bien que les femmes libyennes aient joué un rôle clé pendant le soulèvement de 2011, elles ont eu une présence limitée dans les organes de transition précédents et dans le parlement actuel.
Le prédécesseur du GNU, le gouvernement d’entente nationale, dont le siège se trouve dans l’ouest de la Libye et qui a été établi en 2016, ne comptait que deux femmes sur une trentaine de portefeuilles.
Une administration parallèle de l’Est, non reconnue par la communauté internationale, n’en comptait qu’une seule.
Et alors qu’une décennie d’insécurité et de conflit a eu un impact profond sur la vie quotidienne en Libye, une évolution inquiétante a été la violence contre les militants des droits, y compris les femmes.
En novembre, des hommes armés non identifiés ont abattu en plein jour à Benghazi l’avocate et militante des droits des femmes Hanan al Barassi.