L’ONG internationale humanitaire s’insurge contre la suspension prolongée de ses activités et accuse le gouvernement de dilatoire.
Les équipes de Médecins sans frontière (MSF) rongent leur frein depuis six mois dans la région anglophone du Nord-Ouest. L’ONG humanitaire internationale envisage même de quitter la zone si le gouvernement camerounais maintient l’ordre de suspension de ses activités, décidé le 8 décembre 2020 par le gouverneur du Nord-Ouest, Adolphe Lele Lafrique. « Nos opérations d’urgence ne peuvent rester suspendues indéfiniment. Pour des raisons de sécurité, de finance mais aussi d’identité de MSF, il nous est difficile de rester indéfiniment dans une zone où il nous est interdit de travailler », confie à lurgentiste.com, Emmanuel Lampaert, coordinateur des opérations de MSF en Afrique centrale.
Dilatoire
Après de longs mois de discussions entre MSF et le gouvernement camerounais, l’organisme humanitaire soupçonne ses interlocuteurs gouvernementaux de faire le dilatoire. « Au début, nous pensions que cette suspension serait rapidement levée après la clarification de tous les malentendus et des discussions transparentes sur notre façon de travailler. Mais cela a pris plus de temps que prévu, et nous avons poursuivi de bonne foi les efforts bilatéraux au niveau régional et central. À plusieurs reprises, nous avons pensé qu’une solution était en vue », explique Emmanuel Lampaert.
Au mois de mai dernier, Stephen Paul Cornish, le directeur général de MSF a personnellement fait le déplacement pour Yaoundé pour négocier une reprise d’activité. Sa délégation a d’ailleurs été reçue en audience le 11 mai 2021 par Lejeune Mbella Mbella, ministre camerounais des Relations Extérieures (Minrex), pour trouver un accord définitif. Mais depuis lors, c’est le silence radio du côté des autorités camerounaises qui avaient pourtant rassuré leur hôte humanitaire. « Après des mois de dialogue transparent, nous espérons que les autorités camerounaises réexamineront leur décision et qu’une décision de redémarrage immédiat sera accordée, afin de mettre fin aux souffrances de la population », déplore le coordinateur des opérations de MSF en Afrique centrale.
Santé en péril
Dans la région anglophone du Nord-Ouest, la situation humanitaire des populations se dégrade chaque jour un peu plus. La suspension d’activités de MSF « affecte gravement » les conditions de vie de la population meurtrie par les violences et pour laquelle la présence de cette ONG était la seule façon d’accéder à des soins de santé. D’après MSF, la mortalité maternelle et infantile a augmenté ces dernières années, et des besoins essentiels ne sont pas couverts. A titre d’exemple, des enfants qui souffrent de la malaria ou de diarrhée ne sont pas pris en charge. Idem pour des femmes enceintes qui doivent accoucher et ces personnes ayant besoin de soins chirurgicaux vitaux. « Il y a tant de personnes que nos équipes pourraient soigner gratuitement dès maintenant, mais ils en sont empêchés. Cette situation doit cesser. Qu’il s’agisse de Médecins Sans Frontières ou d’une autre organisation, les gens doivent avoir accès aux soins de santé ».