Un ancien chauffeur d’hôtel a été jugé lundi à Paris, accusé de complicité dans le génocide rwandais de 1994 pour avoir transporté des miliciens hutus qui ont massacré des centaines de Tutsis.
Selon les enquêteurs, Claude Muhayimana a également caché des Tutsis menacés de mort, aidé certains à s’échapper, s’est enfui après le génocide et a acquis la nationalité française en 2010.
L’avocat de Claude Muhayimana, Philippe Meilhac, a déclaré : « Il n’attend qu’une chose, pouvoir s’expliquer. Aujourd’hui, il a la soixantaine, c’est un homme qui a eu une vie difficile, qui est, par les circonstances, épuisé, fatigué, et qui attend de pouvoir s’expliquer et que son honneur lui soit rendu. »
Muhayimana a été arrêté en France en 2014 à l’issue d’une enquête menée par le parquet de Paris spécialisé dans les crimes contre l’humanité.
Il a passé un an en détention préventive avant d’être libéré sous probation, lorsqu’il a repris son travail de réparateur de voirie à Rouen, dans le nord de la France.
Il est accusé d’avoir conduit sciemment des policiers et miliciens hutus appelés Interahamwe pour commettre des massacres dans la région ouest de Kibuye.
Des dizaines de milliers de Tutsis ont été assassinés alors qu’ils cherchaient refuge dans des écoles, des églises et des hôtels.
Muhayimana, qui était marié à une femme tutsie à l’époque, a nié les accusations, affirmant qu’il n’était pas à Kibuye lorsque les massacres ont eu lieu.
« Il va s’expliquer pleinement », a déclaré à l’AFP son avocat Philippe Meilhac avant le procès. « C’est un homme qui attend cela depuis 10 ans. »
Muhayimana sera le premier citoyen « ordinaire » à faire face à la justice ayant été considéré « respectable à tous égards » avant les meurtres, a déclaré Alexandre Kiabski, avocat du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR), l’un des plaignants.
Il risque une peine d’emprisonnement à perpétuité s’il est reconnu coupable.
« Vous savez, un complice, il est accusé de complicité. Et la complicité je pense en droit est exactement la même que si vous êtes un auteur. Donc c’est comme s’il était co-auteur, mais c’est la procédure qui déterminera si oui ou non il en est coupable, qu’il ait ou non collaboré de son plein gré ou non. » Dafroza Gauthier, co-fondateur du groupe qui a initié la procédure a déclaré.
La France a généralement refusé les demandes d’extradition de suspects vers le Rwanda, ce qui a incité le président Paul Kagame à accuser Paris de nier la juridiction rwandaise.
Mais les relations entre les deux pays se sont considérablement réchauffées depuis qu’un rapport d’historiens commandé par le président Emmanuel Macron et publié en mars a reconnu les responsabilités « écrasantes » de la France dans l’incapacité de mettre un terme aux massacres.