Pascal Charlemagne Messanga Nyamding est exclu définitivement du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc) par celui qu’il considère comme son maître politique. L’entame de la descente aux enfers de celui qui se réclame d’être le coordonnateur du mouvement des Biyaïstes est-il actée? Au moment où l’on s’interroge sur la propension des caciques du parti au pouvoir à confiner les modernistes et les Biyaïstes au mutisme, tentons d’émettre une grille de lecture et des conjectures scolastiques probables en termes de scénarii liés à ce que pourra devenir, dans les jours à venir, le désormais ancien membre titulaire du comité central du Rdpc.
Le constat à faire, de prime abord, est l’obstination des conservateurs du parti au pouvoir à restreindre la liberté de penser, la liberté d’expression et la liberté d’opinion, lesquelles sont les formes de libertés fondamentales reconnues et consacrées par les textes nationaux et internationaux. Le 2ème constat à élaborer est relatif au fait qu’en se prévalant, chaque fois, de la posture de Biyaïste dans ses prises de positions publiques, P.C. Messanga Nyamding a cru être épargné de toute forme de sanction négative venant de celui qu’il perçoit comme son maître politique, à savoir Paul Biya.
Or manifestement, il est impossible de vouloir combattre des lobbies de pouvoir que cette figure politique qualifie, régulièrement, de maffieux, en soutenant, paradoxalement, l’hégémon central de tout son cœur et de toute son âme. C’était techniquement inadmissible de penser que le président national du Rdpc acceptât que ses camarades du bureau politique, du comité central et des membres du gouvernement qu’il eût nommés ne fussent invectivés sans qu’il ne se retrouvât, lui-même, épinglé dans le jeu de la diffusion de ces formes d’outrages.
Le désormais ancien membre titulaire du comité central du Rdpc, en dépit de la défense, tous azimuts, du Biyaïsme, n’a pas réussi à se tirer d’affaire face à l’extrême liberté d’expression et d’opinion dont il jouissait sans être dûment mandaté par la sous-commission communication du parti, laquelle diffuse une programmation hebdomadaire des communicants dans chaque
média. Visiblement, les frontières de cette liberté outrancière ont été franchies suivant la sentence prononcée par la commission de discipline ad hoc et entérinée par le président national du parti au pouvoir. Le parti du flambeau ardent démontre, pour ainsi dire, toute la violence qui le caractérise. Violence orchestrée par des caciques du parti ayant horreur de la réac- tance, de la résistance, de la virulence et de la dissidence venant des cadres et des militants.
Messanga Nyamding va, sans conteste, rejoindre une litanie des frustrés de cette formation politique, dont certains ont quitté la barque après avoir été exclus par le passé. Bonaventure Saint Eloi Bidoung, ancien adjoint au maire de la commune d’arrondissement de Yaoundé VIème, avait écopé d’une exclusion temporaire de 36 mois pour des faits d’indiscipline. La com- mission Musonge avait fait deux reproches distincts à l’actuel conseiller municipal:
1. Le fait d’avoir fait acte de candidature lors des élections du maire de la ville de Yaoundé alors que le comité central du parti avait, dûment, investi Luc Messi Atangana.
2. Les prises de positions de ce dernier dans les tribunes commises régulièrement dans les médias où il avait battu en brèche certains dignitaires du parti au rang des- quels figure le Secrétaire général du comité central du Rdpc, Jean Nkuete.
N’ayant pas approuvé cette décision, Bidoung a créé son parti politique dénommé le Parti des pauvres du Cameroun (Ppc). Cet homme politique avait su quitter le navire avant le pire. D’autres militants du Rdpc partisans du courant moderniste, qui avaient critiqué, de manière viscérale, le régime en place, ses tares, ses dysfonctionnements, ainsi que certains conservateurs, ne vivent plus aujourd’hui. Charles Sylvestre Ateba Eyene et Pius Otou, tous les deux membres suppléants du comité central du parti, furent des fervents critiques qui défendirent cette branche moderniste.
Mais tous les deux avaient rendu l’âme. Pierre Mila Assoute, ancien cadre du Rdpc, qui avait, initialement, enclenché le cycle de la défense dudit courant, avait subi des turbulences des conservateurs. In extremis, celui qui avait fondé son nouveau parti, le Rassemblement démocratique pour la modernité du Cameroun (Rdpc), avait quitté le pays pour l’étranger, où il séjour- ne jusqu’à ce jour.
D’ores et déjà, Messanga Nyamding a l’opportunité de tourner la page du parti au pouvoir dans lequel il a milité durant 37 ans. Il peut se lancer dans une nouvelle aventure, en créant une nouvelle formation politique. Cet homme politique a le choix entre créer un nouveau parti politique, intégrer une formation politique de l’opposition déjà existante ou alors rester et demeurer cohérent et constant dans sa logique de soutien invétéré accordé au Biyaïsme. Le Frankisme étant déjà une idéologie politique existante qui défraie la chronique depuis ces derniers mois, il n’est pas exclu que le natif du département du Nkam reste arc-bouté sur le Biyaïsme, doc- trine politique à laquelle il reste et demeure, indéfectiblement, lié et attaché.
Par Serge Aimé BIKOI, Journaliste et sociologue du développement