Un ancien haut responsable rwandais a été jugé à Paris lundi, accusé de complicité dans le génocide de la nation africaine, la personnalité la plus haut placée qui n’a pas encore été traduite en justice en France pour les massacres de 1994.
L’affaire Laurent Bucyibaruta est la quatrième du génocide rwandais à être portée devant les tribunaux en France, qui a longtemps été sous la pression des militants pour agir contre les auteurs présumés qui s’étaient réfugiés sur le sol français.
On estime que 800 000 Tutsis et Hutus modérés ont péri en 100 jours de massacre en 1994 au cours desquels des miliciens hutus ont massacré des Tutsis se cachant dans des églises et des écoles.
En cours de procès pour génocide, complicité de génocide et complicité de crimes contre l’humanité, Bucyibaruta encourt une peine d’emprisonnement à perpétuité s’il est reconnu coupable.
L’homme de 78 ans, qui souffre de problèmes de santé, est entré dans la salle d’audience en fauteuil roulant, une canne à la main.
Bucyibaruta, d’une voix rauque, a demandé s’il pouvait rester assis, comme l’a proposé le président du tribunal.
Au coeur de l’affaire se trouvent plusieurs réunions « de sécurité », soit ordonnées par Bucyibaruta, soit auxquelles il a participé. L’accusation dit qu’il s’agissait de séances de planification d’abattage.
Des dizaines de milliers de morts
L’ancien préfet de la province méridionale de Gikongoro est notamment accusé d’avoir persuadé des milliers de personnes de se réfugier au lycée technique de Murambi, en leur promettant nourriture, eau et protection.
Mais quelques jours plus tard, aux premières heures du 21 avril, des dizaines de milliers de Tutsis ont été exécutés dans l’un des épisodes les plus sombres du génocide.
Le tribunal discutera également de la responsabilité de Bucyibaruta dans le massacre d’environ 90 élèves tutsis à l’école Marie Merci de Kibeho le 7 mai et dans l’exécution de prisonniers tutsis – dont trois prêtres – à la prison de Gikongoro.
Bucyibaruta nie les accusations et réfute toute implication dans les tueries. Ses avocats vont d’abord demander le non-lieu pour délais déraisonnables, la procédure ayant débuté il y a 22 ans.
Mais si cela échoue, la défense de Bucyibaruta a déclaré à l’AFP qu’elle demanderait son acquittement.
Le procès devrait durer deux mois et présenter plus de 100 témoins, dont des survivants du Rwanda, qui ont survolé ou comparaîtront par vidéoconférence.
Bucyibaruta, qui est en France depuis 1997 et sous contrôle judiciaire, souffre de myriades de problèmes de santé qui devraient limiter les audiences à sept heures par jour.
Quatre personnes dans trois affaires ont déjà été condamnées par les tribunaux français pour génocide : un ancien chauffeur d’hôtel condamné à 14 ans de prison, un officier de l’armée emprisonné à 25 ans et deux maires condamnés à perpétuité.